pouvoir camper sur des terres protégées
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Droit de la famille Les familles et leur patrimoine
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Couples non mariés : j’ai légué l’usufruit de notre logement à ma moitié, puis-je dormir tranquille ?

Combien de couples non-mariés aujourd’hui ?

et qui pourtant partagent un logement, acquis en commun ou non, mais pour lequel chacun souhaite que dans le cas de son décès, l’autre puisse continuer à y librement résider jusqu’à sa propre mort ?

Et bien souvent, on se pense complètement en phase avec cet objectif grâce au conseil un peu rapide que nous aurons lu çà et là, de nous consentir mutuellement un legs portant sur l’usufruit de la part de chacun, le tout packagé avec un beau PACS qui nous permet d’être à l’abri des droits de succession entre nous.

Mais qu’est-ce que la Cour de cassation a rappelé de fondamental, dans un arrêt qu’elle a prononcé le 22 juin 2022 (file:///C:/Users/VMO/Downloads/pourvoi_n%C2%B020-23.215_22_06_2022.pdf) à l’occasion d’un litige entre héritiers ?

Elle a confirmé avec force la méthode de l’imputation en assiette comme étant la seule à s’appliquer, pour apprécier si le legs réalisé par un défunt en faveur d’un tiers empiète ou non sur la part réservée aux enfants.

En clair, qu’est-ce que ça signifie ?

Exemple : je suis pacsé, je vis avec ma partenaire que je veux protéger si je meurs avant elle, lui laissant le droit de continuer à vivre chez nous jusqu’à la fin de ses jours.

Comme je suis bien informé, j’ai compris que le pacs en lui-même ne suffit pas à atteindre cet objectif, puisqu’il ne crée aucun droit à hériter l’un de l’autre (à part un simple droit au maintien dans les lieux pendant 12 mois).

Je rédige donc un beau testament, dans lequel j’écris que ma partenaire recueillera à mon décès l’usufruit de tous mes biens.

Avec ça, je suis tranquille :

  • l’usufruit lui donne le droit de rester à vie dans le logement, voire de le mettre en location et d’en percevoir le fruit, si elle doit quitter les lieux ;
  • et le pacs lui permet d’éviter tous droits de succession sur la valeur qu’aura cet usufruit.

Car bien sûr, ce droit d’usufruit représente en lui-même un prix, une valeur, laquelle est fonction à la fois du prix des biens sur lesquels il s’applique, et de l’âge qu’aura la bénéficiaire : puisque plus on est jeune, plus on a de chances de vivre longtemps, et donc plus l’usufruit représente un pourcentage important du prix total du ou des biens.

Simplement j’ai des enfants.

Ils sont des héritiers protégés par la loi sur ma succession (autant que moi je peux l’être sur la succession de mes parents). Ce qui se traduit par le fait qu’une fraction de mon héritage est leur domaine réservé, et doit leur revenir à eux, sans aucune charge à déduire : par exemple si j’ai trois enfants, cette réserve est égale à 75% de mon patrimoine.

 

Mes descendants sont des héritiers protégés par la loi sur ma succession. Pas seulement quant au volume de leur part (1/2, 2/3, ou 3/4 de la succession, selon leur nombre) mais aussi quant à la nature de leur droit : à savoir une part en PLEINE PROPRIETE, un point c'est tout. Peu importe la valeur de l'usufruit (et donc l'âge de l'usufruitier) qui s'applique sur cette part.

Cela signifie que si je veux léguer quelque chose à quelqu’un d’autre, comme ma partenaire, je ne peux le prendre que sur la partie de ma succession qui ne dépend pas de ce domaine réservé (dans l’exemple, les 25% qui restent).

D’aucuns ont donc pensé que si la valeur convertie en euros de l’usufruit légué ne dépasse pas cette fraction disponible (par exemple, si ma compagne est âgée de 85 ans à mon décès, son usufruit peut être chiffré grossièrement à 20% du prix, donc moins que les 25% disponibles sur la globalité de mon héritage), les enfants ne peuvent rien réclamer à la légataire.

 

Mais cette conversion est en fait totalement inutile, et c'est même une fausse idée, source d'erreurs aux lourdes conséquences.

La Cour rappelle en effet que peu importe la valeur de l’usufruit (et donc l’âge du capitaine) : si son assiette est un bien dont le prix excède la quotité disponible, alors les enfants peuvent demander un dédommagement à hauteur de l’excédent. Ma compagne aura beau avoir 25, 85 ou 105 ans, si le bien couvert par son usufruit dépasse 25% de l’assiette globale, elle devra de toute façon payer pour conserver son legs !

 

Alternative : songer au mariage !

c’est la seule exception qui permet de camper comme usufruitier sur les terres des héritiers réservataires.

 

Ou alors, recourir à d’autres méthodes que le legs, qui soient affranchies du droit des successions : assurances-décès, assurances-vie, échange croisé de droits démembrés sur les titres d’une société civile, dans laquelle on aura pris soin d’intégrer préalablement ce logement. Toutes autres stratégies pour lesquelles nous sommes à votre disposition, consultez nos équipes spécialisées : https://www.lamanufacture-notaires.fr/les-equipes/