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PER, IFI et droits de succession : une valse à trois temps.

Le Plan d’Epargne Retraite (ou PER) est ce nouveau produit d’épargne introduit en 2019 par la loi PACTE.

Quelles sont ses caractéristiques essentielles ?

Il a eu pour objet de remplacer et fédérer tous les différents outils qui existaient auparavant (contrat loi Madelin, PERP, etc..).

Mais aussi :

  • de simplifier, en étant ouvert à tous  : je peux souscrire un PER que je sois salarié ou professionnel indépendant ;
  • d’assouplir, car le moment venu (= lors ma prise de retraite), j’aurai le choix. Je pourrai récupérer les sommes que j’aurais ainsi épargnées soit en capital, d’un coup, soit en les étalant sous forme de rente.
En revanche, dans tous les cas, je ne peux en principe pas récupérer mon épargne avant que n’arrive l’âge de mon départ à la retraite, sauf cas précisément prévus par la loi.
Le Code Monétaire et Financier (CMF) prévoit, en tout et pour tout, six cas dans lesquels l'épargnant peut être admis à débloquer l'épargne constituée, avant le départ à la retraite.

Si je décide de disposer de l’épargne sur ce type d’enveloppe financière, je dois savoir que c’est pour du temps long.

Epargne bloquée un temps certain

En effet, je ne pourrai pas la récupérer, même si j’ai envie de réaliser un autre investissement, avant que :

  • je prenne ma retraite (atteignant donc l’âge auquel je peux faire valoir mes droits),
  • ou que j’achète ma résidence principale,
  • ou que je subisse un accident de la vie, justifiant que je puisse utiliser mon argent pour y faire face.

Ce sont les fameux cas de déblocage anticipé que tolère l’article L.224-4 du CMF : chômage, perte de capacité, décès du conjoint, surendettement, etc…

Le PER est donc un produit de long terme, d'autant plus si l'on s'y prend jeune !

Ce qui explique son succès.

Beaucoup d’épargnants en effet se sont dit : « Enfin un produit sur lequel, le moment venu, je pourrai immédiatement récupérer le capital ; je ne serai pas contraint de m’enfermer dans une situation de rente ».

En effet, nombreux sont ceux qui la considèrent comme étant par définition risquée (à savoir : si je meurs avant d’avoir tout récupéré, alors l’excédent est perdu pour mes proches).

Certes, l’on pourrait dire que la sortie en capital immédiat présente elle aussi d’autres risques (quelle politique de placement le moment venu ?)

Mais c’est un autre sujet.

En toute hypothèse, les sommes que je flèche vers cette enveloppe doivent entretemps être gérées en tenant compte de cet objectif de long terme.

Et ceci, plus encore pour ceux qui ont parfois la bonne idée de coupler un PER avec un schéma de transmission !

Comment ça ?

Rien n’interdit de souscrire par exemple un PER au nom de vos enfants.

Dans cette configuration, vous versez par exemple sur ce contrat des sommes que vous lui donnez.

A ce stade, en présence d’enfants jeunes et donc par définition très éloignés de leur horizon de retraite, vous pouvez imaginer de verser une somme modique sur le PER.

En espérant que ce soient les années qui fassent fructifier cette épargne, jusqu’au moment où ils la retrouveront pour l’utiliser.

Un peu comme le traditionnel livret de caisse d’épargne, alors ?

Oui ! A ceci près que pour le PER, les modalités de placement sont taillées pour accompagner ce processus de long terme, en épousant au choix de modalités possibles de placement, faites pour cela.

Ainsi, il pourra être souscrit :

  1. soit sous forme de contrat d’assurance-vie, multi-supports évidemment : les sommes placées dans le PER assurance-vie pourront donc être diversifiées entre fonds euro, marchés actions, marchés obligataires, pierre-papier, etc..
  2. soit sous forme de compte titres : et là aussi, avec de multiples panachages possibles (actions marchés matures ou émergents, titres de sociétés cotées, capital-risque, pierre-papier, valeurs tech,..).
Avec en plus ici un avantage juridique majeur : la sécurisation de l'usage ultérieur des fonds par les enfants, légalement garantie !

Car rappelons-le : les sommes ne sont pas déblocables en dehors des cas ci-dessus, tels qu’encadrés par la loi.

Donc, si je veux être sûr que mes enfants ne dilapident pas ce don, et l’utilisent soit pour leur future retraite, soit pour l’achat de leur résidence principale, soit pour les aider en cas de vrai pépin, c’est effectivement un bon outil…

En effet : inutile de chercher à stipuler de complexes clauses d’obligations d’investissements, ou d’interdictions d’utilisation pour telles ou telles dépenses : la loi l’a fait pour vous !

On peut ainsi combiner une vertu de sécurisation juridique des emplois de ces fonds, avec une force de diversification économique des investissements, et pour toute la durée que la loi elle-même a étalonnée.

Oui mais là, je prends plus de risques sur mon capital  ?

C’est exact : ces placements diversifiés plus ou moins soumis aux aléas, et donc au risque, sur le moment.

Mais sur le temps long, ils peuvent donner accès à un ratio favorable entre ce risque et le rendement attendu.

Car entretemps, le risque supporté pendant des années, voire des décennies, aura certes traversé X crises, mais autant de rebonds. Lesquels, au bout du compte, auront pu permettre d’acquérir des plus-values sensibles (qu’il appartient au gestionnaire de peu à peu cristalliser, en rapatriant les fonds vers du monétaire sécurisé, au fur et à mesure du rapprochement du terme que constitue la retraite professionnelle).

Donc, si je place aujourd’hui des sommes sur un PER au nom de mes enfants, qu’ils mobiliseront dans 50 ans…

… l’eau aura coulé sous les ponts !

Et vous leur aurez donné l’opportunité de détenir en douceur un portefeuille de titres, peut-être petit au départ, mais qui peut-être aussi sera devenu gros. Si tel est le cas, vous aurez tout gagné pour eux. Si par malheur tout est perdu au moment où ils récupèrent les fonds, alors on ne devrait pas avoir perdu grand chose, compte tenu de la faible mise de départ. Et pour eux, qui n’ont rien versé, c’est de toute façon indolore.

Du coup, les quelques centaines ou milliers d’euros placés au départ auront pu connaître un fort effet de levier le moment venu !

Exactement. L’effet de démultiplication peut devenir majeur pour les enfants.

Et de plus, sans aucun droits de succession à leur charge.

Car n’oublions pas que dans l’exemple, il s’agit d’alimenter un contrat qui est à eux, ouvert à leur nom. Seule la mise de départ est un don, d’autant peu taxable qu’il sera modeste. Le gain futur sera à eux, donc sans transmission, donc sans droits de mutation (leur impôt sur le revenu est une autre question).

Mais attention : c'est aussi en raison de ce potentiel développement, qui ne sera pas forcément le même sur tous les PER selon leur composition ou le profil des placements qui s'y trouvent, que nous préconiserons toujours d'agir avec soin et précision, si vous êtes en présence de plusieurs enfants.

En effet, si  vous placez 100 par exemple sur un PER n° 1 pour votre fils chéri Auguste, et 100 par ailleurs sur un PER n° 2 pour votre fille adorée Bérénice, rien n’indique qu’à votre décès les sommes auront connu une évolution identique.

Si l’un a connu un enrichissement meilleur que l’autre, celui des deux qui en aura profité devra, légalement, dédommager l’autre, au moment de  répartir votre succession !

Afin d’éviter cela, nous conseillerons souvent, même (et surtout) si les mises de base sont modiques, de procéder à l’enregistrement de cette donation de départ au moyen d’un acte authentique, et officiel : la donation-partage.

Celle-ci vous permettra de constater une fois pour toutes l’égalité entre chaque enfant, devant notaire, et de définitivement s’en tenir aux chiffres initiaux.

Les gains futurs leur profiteront ensuite selon la destinée de leur placement.

Et j’ai bien compris : Ces gains auront d’autant plus de chances de se développer que le contrat aura fonctionné longtemps et sur plusieurs compartiments variés !

Sans doute ; et parmi ces compartiments, on pourra entre autres rechercher des placements en lien avec le monde de l’immobilier : parts de SCPI, titres d’OPCI, titres de SIIC cotées, etc…

Gardons en tête que la valeur de ces placements, et leur éventuelle croissance, concernera le foyer fiscal tant que l'enfant titulaire du PER sera rattaché à ce foyer.

Je vous vois venir…

En effet, cela nous ramène à nos moutons de l’IFI (Impôt sur la Fortune Immobilière).

Nous savons que depuis son instauration en 2018, cet impôt implique de prendre en compte, afin de définir si l’on dépasse le seuil de déclenchement, la totalité des actifs immobiliers détenus par les membres du foyer fiscal, que ce soit directement ou non.

Dès lors, tous les placements financiers orientés vers les marchés immobiliers (SCPI, OPCI, etc…) doivent entrer dans  la déclaration.

Y compris ceux détenus à travers un PER ??

Normalement non, par exception, quand le PER prend la forme d’une assurance-vie.

Et ceci, en raison du caractère justement indisponible du PER, tant que l’un des cas de déblocage prévus par la loi n’est pas survenu : soit l’arrivée de la retraite, soit l’un des cas de déblocages anticipés vus plus haut.

En dehors des hypothèses de déblocage, le PER - contrat d'assurance-vie n'est pas rachetable : en attendant, il ne devrait donc pas pouvoir être intégré à l'IFI. C'est en tous cas la confirmation qu'a demandé un parlementaire au Ministère des Finances .

Arrêtons ce suspense ! Quelle a été la réponse ??

Elle a été exprimée dans une Réponse Ministérielle Malhuret du 9 février 2023. Son message est simple.

A travers son ministre, l’administration fiscale confirme que la valeur des placements à connotation immobilière détenus sur un PER n’ont pas à être déclarés à l’IFI, tant que ne survient pas l’un ou l’autre des cas de déblocage.

En revanche, ils deviennent imposable dès lors que survient l’un de ces cas, ET CE, MEME SI en réalité vous ne procédez à un déblocage. Il suffit de rencontrer l’un des cas prévus par la loi pour que le contrat soit considéré comme rachetable, et donc potentiellement imposable à l’IFI, même si en réalité il n’y a aucun rachat !

Donc par exemple, si j’achète une résidence principale, ou si je perds mon conjoint, ou si je deviens invalide… les unités de compte immo de mon PER deviendront imposables à l’IFI, même si je ne l’ai pas débloqué ?!

C’est en effet le  sens de cette réponse, qui adopte une lecture rigoureuse de la notion de contrat rachetable, vs l’idée de contrat racheté.

comme d’habitude, cela souligne le fait qu’un tel placement ne devra pas être choisi en contemplation d’une cerise fiscale (ici l’exonération d’IFI), mais bien pour des raisons structurellement patrimoniales solides (exemple : constituer un complément de retrait pour soi ou ses enfants).

D’autres sujets seraient à évoquer, comme la question de la propriété du PER quand on est marié sous un régime de communauté de biens.

Pour toutes ces questions, n’hésitez pas à solliciter nos équipes dédiées à l’ingénierie patrimoniale.