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Baux commerciaux
culture juridique pour tous

Bail commercial : attention au loyer du locataire qui assume d’importants travaux !

Je suis l’heureux locataire, dans le cadre d’un bail commercial, d’une belle petite boutique bien située.

Les affaires marchent bien.

Et pour me développer, j’ai besoin d’effectuer certains travaux dans le local, qui n’est plus totalement adapté.

Donc, avec l’accord du bailleur, je réalise ces travaux de modifications dans le local, pour faciliter mes conditions d’exploitation.

Et là, premier point d'attention !

Car je n’ai pas seulement repeint les murs, modifié les réseaux électriques ou changé l’aménagement : j’ai détruit certaines cloisons, j’en ai édifié d’autres, j’ai aménagé pour ma clientèle ou pour les stocks certaines surfaces vides, etc…

Donc, ces travaux m’ont  amené à modifié notablement les caractéristiques des locaux.

Et alors ?

Alors, en vertu de l’article R.145-3 du Code de commerce, ils constitueront un motif de déplafonnement du loyer, lorsque le bail connaîtra son premier renouvellement (au bout de la première période de neuf ans).

Donc je dois prendre garde à cette potentielle augmentation du loyer.

Elle pourra faire suite à ces travaux parfois des années plus tard, puisque ce sera  dans le cadre d’un déplafonnement (qui ne pourra intervenir que lors du 1er renouvellement).

Mais ce n'est pas tout !

Attention aux conséquences qu’une autre catégorie de travaux peut avoir sur le loyer.

En effet !

Moi, locataire, j’ai décidé de complètement restructurer les locaux (toujours avec l’accord du propriétaire, bien sûr). Je veux revoir profondément leurs qualités, et leur adéquation à mes nouveaux modes d’exploitation.

Cette fois, boum ! je frappe un grand coup !

Et me voilà lancé dans de lourds investissements, qui créent des améliorations notables du local.

Exemple :

  • je reprends le gros œuvre,
  • je bâtis une surface supplémentaire dans la cour,
  • je refais toutes les huisseries,
  • je revois toute la circulation,
  • je crée une dalle,
  • je refais un escalier,

ça va être le plus beau commerce du quartier !

En effet.

Et cette fois, c’est l’article R 145-8 du Code de commerce  qu’il nous faut consulter…

Oui ! Je l’ai fait !

et c’est tout bon pour moi : car c’est moi, le locataire, qui ai payé les travaux !

Car de telles améliorations (= elles ne sont plus de simples modifications) justifient un déplafonnement du loyer lors du 1er renouvellement seulement si le bailleur en a assumé la charge.

Chose qu’il aurait fait directement, en acquittant le coût des travaux, ou indirectement, en me consentant une réduction temporaire du loyer.

Mais rien de tout ça ! J’ai tout payé !

Oui, mais si c’est le locataire qui a financé, ces travaux  constituent un motif de déplafonnement : mais ce sera que lors du 2nd renouvellement, c’est-à-dire lorsque les améliorations deviennent la propriété du bailleur.

 

Ceci se réalise par application du principe de l'accession différée à cette propriété = les améliorations "s'agglomèrent" directement aux murs ou au sol d'origine dont le bailleur était initialement le propriétaire (voir par exemple Cass. 3e civ. 22-3-1995 n° 93-14.282). 

Glups …

Mais alors, si moi le locataire, je réalise à mes frais des travaux qui sont à la fois des modifications et des améliorations du local, et qu’on en est au deuxième renouvellement, qu’est-ce qui se passe ?

Est-ce que le propriétaire peut encore demander le renouvellement, parce qu’on considèrerait les travaux d’amélioration ?

Ou est-ce trop tard pour lui, parce qu’on considèrerait les travaux de modification ??

En clair, dans un tel cas qu’est-ce qu’on fait primer ?

Réponse dans l’arrêt rendu le 7 septembre 2022 par la Cour de cassation, qui indique que c’est bien le régime des améliorations qui prédomine. Le déplafonnement est donc possible lors du deuxième renouvellement de bail.

L’équilibre des rapports est chose complexe en matière de baux commerciaux, n’hésitez pas à solliciter nos équipes spécialisées !