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Vente en viager : un contrat d’actualité comme jamais !

Au cours des dix dernières années, le marché du viager a progressé de 5 % à 6 % par an. Voilà donc un phénomène qui a toujours existé, mais qui s’accroît.

Et il sort peu à peu de sa traditionnelle confidentialité.

 

Qui choisit de vendre en viager et pourquoi ?

En général, côté vendeurs, des propriétaires  d’un âge avancé, voulant obtenir un complément de revenus durable, indexé sur le coût de la vie ou l’évolution des loyers. Ou tout autre indice librement convenu.

ça ne concerne que les personnes sans héritiers ?

Pas que.

Certains choisissent cette formule pour décharger leur famille des frais d’une maison de retraite, par exemple.

Car elle est pertinente pour répondre à l’urgence socioéconomique qui cerne la question du logement.

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Quelle « urgence socioéconomique » ?

Le Congrès des Notaires 2023, qui a pour thème « le logement », en parlera haut et fort.

Elle est partout sous nos yeux :

  • vieillissement de la population ;
  • accroissement des coûts de la dépendance ;
  • crainte sur la pérennité des aides et des systèmes de retraite ;
  • concentration de l’immobilier chez les seniors ;
  • alourdissement des normes de rénovation énergétique ;
  • augmentation du prix de l’énergie ;
  • préférence marquée des Français pour un maintien le plus longtemps possible dans leur domicile ;
  • volonté de monétiser une partie de son patrimoine, tout en conservant son « chez soi », …

Voici donc des facteurs déclenchants chez les vendeurs âgés. Mais côté acquéreurs ?

Pour eux, les motivations seront souvent de :

  • pouvoir accéder en douceur au marché structurellement inflationniste du logement,
  • sans recours à l’emprunt bancaire et à ses taux qui enflent,
  • au moyen d’un effort moins brutal de trésorerie,
  • en profitant d’emblée d’une décote sur le prix liée à jouissance des lieux que se réserve à vie le vendeur, plutôt que de percevoir des loyers qui seraient lourdement fiscalisés,
  • d’investir dans une source de revenus futurs propres à se substituer à une retraite qui devient hypothétique,  etc…
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Comment le prix du bien est-il fixé ?

Comme pour n’importe quelle vente immobilière !

= en fonction de la localisation du bien, de son état…  et selon qu’il est vendu libre, ou au contraire occupé par le vendeur.

En général, une partie du prix est versée comptant lors de la signature chez le notaire : elle oscille souvent en pratique entre 10 et 30% du prix, mais il n’existe aucune règle obligatoire et tout est affaire de négociation. C’est ce qu’on appelle le  « bouquet ».

Tout ce qui n’est pas réglé comptant est converti en rente viagère : le montant périodique de celle-ci (dont la fréquence est également à librement convenir) est calculé en fonction de :

  • l’espérance de vie du vendeur (ou des vendeurs, s’il s’agit d’un couple – on parle alors de viager « sur deux têtes »)
  • et de la rentabilité locative estimée du bien.

L’aléa est une composante importante du viager : de quoi s’agit-il ?

Cet aléa résulte bien sûr de l’incertitude liée à la durée de vie réelle du vendeur.

En effet, puisque nous sommes tous des cas particuliers, les tables statistiques ne donnent qu’une indication, pas une garantie !

Dès lors, le vendeur (dénommé le crédirentier) comme l’acquéreur (le débirentier) supportent l’un et l’autre un risque de perte et une chance de gain.

Comment cela ?

Le crédirentier peut craindre de décéder avant d’atteindre l’âge statistique sur la base duquel a été calculé le taux de la rente, et donc, d’avoir bradé son bien, laissant une ombre de son patrimoine à ceux qui lui succèderont.

A l’inverse, le débirentier, surtout si c’est un particulier qui réalise une opération unique, redoute que le vendeur vive au-delà de son espérance de vie. Donc de faire une mauvaise affaire en surpayant le bien.

Or, cet aléa doit exister : c’est même une condition de validité d’une vente en viager !

Si l’aléa n’existe pas, parce que le vendeur se sait par exemple condamné à brève échéance par une maladie incurable, ou que la rente est trop minime par rapport à sa faible durée de vie résiduelle, la vente pourra être annulée.

La dimension psychologique qui en découle est sans doute l’une des raisons du caractère encore confidentiel de ces contrats.

Car à bien y regarder, en dépit de la forte croissance mentionnée plus haut, ce marché reste étroit : le nombre de ventes en viager, compris entre 5 000 et 6 000 chaque année sur tout le territoire, représente à peine 1 % du marché immobilier, avec des disparités selon les régions.

 

Qu’est-ce qui peut faire freiner devant ce contrat ?
Son image de pari risqué, bien sûr !
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Une image de légende urbaine.

Image qui, il faut bien le dire, a été fortement alimentée par le fameux succès cinématographique de Pierre Tchernia tourné précisément sur ce thème, décrivant les mésaventures de trois générations de crédirentiers qui se suivaient et n’en finissaient plus de voir Michel Serrault si bien se porter !

Suivi, quelques années plus tard, du cas très réel et très médiatisé de Jeanne Calment, doyenne des Français, décédée à 122 ans, après avoir perçu durant des décennies sa rente viagère.

Ces exemples ont durablement marqué les esprits.

Mais en réalité, l’histoire vraie de Madame Calment devrait justement plaider pour l’outil, qui s’est révélé excellemment adapté à cette situation pourtant extrême !

Regardons de plus près, au-delà des racontars habituels.

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D’une part, elle a disposé toute sa vie, c’est vrai, d’un revenu que rien n’aurait pu lui offrir avec la même régularité ; voilà qui est rassurant pour les vendeurs.

D’autre part, l’acquéreur puis ses héritiers ont joui du logement bien des années avant que la crédirentière ne s’éteigne.

C’est possible ?

Bien sûr ! Il suffit de prévoir toutes ces variantes dans le contrat !

Elle avait en effet libéré les lieux longtemps avant son décès, tout en conservant son droit à la rente (qui peut même de ce fait, si on a pris soin de le stipuler, voir son montant augmenter), et eux ont donc pu rentabiliser l’investissement, en le louant.

Enfin, entre le jour de la vente en viager et le jour du décès de la crédirentière, le logement acquis avait connu une plus-value de l’ordre de …400%.

Il y a pire comme investissement, même au prix d’une rente.

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Tout cela pour dire qu’il faut se méfier des idées reçues, et surtout que l’arbre ne doit pas cacher la forêt.

Car évidemment, dans la plupart des cas, la durée de vie du vendeur se situe dans la fourchette indiquée par les tables de mortalités.

 

 

De plus, de nouvelles palettes plus nuancées se développent aujourd'hui

Des formules alternatives émergent, justement pour s’attaquer à ce ressenti de l’aléa :

  1. solutions de mutualisation à travers des fonds collectifs de placement (je ne mise plus sur l’achat d’un seul bien immobilier, mais sur celui de titre au sein d’un fonds qui va acquérir des centaines de biens, et donc diviser d’autant le risque que je tombe sur Jeanne Calment bis),
  2. ou solutions d’assurances couplées à la rente (si le crédirentier dépasse la moyenne d’âge, l’assurance prend en charge tout ou partie de la rente due par l’acquéreur ; si au contraire il décède trop jeune, ce sont ses héritiers qui sont dédommagés),
  3. solutions de partage transgénérationnel du logement avec échange de services permettant de réduire le montant de la rente,

pour ne citer qu’elles.

Quelle règle de calcul pour la rente ?

Il existe diverses méthodes de calcul pour la détermination de la rente, puisque là encore, la liberté contractuelle est complète. Attention donc à ne pas se tromper :

  • dans la détermination du taux de rendement potentiel du bien,
  • sans parler des pondérations liées aux calculs d’actualisation, non seulement des rendements futurs, mais aussi des plus-values de marché estimatives.

Art ô combien difficile, qui réclame sans doute l’intervention de spécialistes, que ce soit parmi les intermédiaires de vente, les financeurs, les notaires, etc…

Et hormis les hypothèses de vente de la nue propriété au comptant, qui sont donc autre chose que le viager, le vendeur fait aussi "la banque"...

Comment le crédirentier  peut-il s’assurer que la rente lui sera régulièrement versée ?

Pour cela, le notaire s’assurera que le contrat protège spécifiquement le vendeur, dans ce rôle de prêteur qu’il assume puisqu’il fait crédit pour une durée indéterminée sur le prix qui lui revient.

Pour cela, l’acte authentique contiendra l’inscription d’une hypothèque légale sur le bien jusqu’à complet paiement, ou mieux encore, la stipulation d’une clause de réserve de propriété, voire la mise en place d’une fiducie (vaste sujet), etc…

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Et la fiscalité dans tout ça ?

Concernant l’impôt sur la plus-value, la vente en viager ne diffère pas d’une vente classique.

Le vendeur sera donc exonéré en cas de vente de sa résidence principale, ou de tout autre bien s’il le détient depuis plus de trente ans.

par ailleurs, l’impôt sur le revenu viendra s’appliquer sur les échéances de la rente. Mais avec un confortable abattement, en fonction de l’âge (à partir de 69 ans, seuls 30% de la rente seront taxables).

Quant à l’IFI, si on est concerné, il est à la charge de l’occupant (donc du vendeur, quand il y a maintien d’usufruit ou de droit d’usage).

Enfin, s’agissant des impôts locaux, c’est en principe l’usufruitier qui les assumera. Mais les conventions négociées en sens contraire sont possibles.

 

Voilà donc un contrat qui a toujours existé, et se pratique depuis des siècles. Mais qui, on le constate, apporte des réponses étonnamment adaptées aux caractéristiques de notre société moderne.

La diversité des cas est telle que ce ne sont là que quelques-unes des questions qui se posent. Il sera toujours bon d’analyser celles-ci en s’y penchant de près, avec ses Conseils.

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Que vous soyez cédant, investisseur, ou intermédiaire, n’hésitez pas à solliciter sur ces questions nos équipes de spécialistes : ils seront attentifs à toutes les facettes de ces ventes passionnantes !