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Droit des sociétés
culture juridique pour tous

Réforme du PCG, la réaction en chaîne !

Et si l’un des impacts patrimoniaux majeurs de cette année 2025 ne découlait finalement pas d’une loi de finances si longue à venir ?

Mais bien du

nouveau PCG (Plan Comptable Général)

entrée en vigueur au 1er janvier ??

Le big bang ne concerne pas que les experts-comptables aux prises avec les comptes des entreprises.
Au contraire, les conséquences fiscales, juridiques, financières, touchent chacun dans son quotidien : professions du droit, de la finance, dirigeants d'entreprises, gérants ou associés de sociétés commerciales ou non.

Même M. & Mme Toutlemonde et leur SC familiale détenant la résidence principale, ou quelques placements, ont intérêt à s’intéresser à ce sujet souterrain.

Car comme tous les sujets souterrains, il est, par le fait même, fondamental.

Oui ! C’est le sol sur lequel tout s’appuie.

De quoi s'agit-il ?

Le règlement ANC (Autorité des Normes Comptables) 2022-06 s’applique à tous les exercices sociaux ouverts à compter du 1.1.25.

Simplification des états financiers, nouvelle présentation des annexes, disparition des transferts de charges,…

mais SURTOUT, une NOUVELLE DEFINITION comptable du résultat exceptionnel !

Et donc aussi, par effet miroir, du résultat courant.

Désormais, avec le nouveau PCG, une entrée d’argent (ou une sortie) n’échappera au flux du résultat courant que si elle est liée à un « évènement majeur  et  inhabituel ».

Or, que chance ce cumul désormais requis de ces 2 paramètres pour que le produit (ou la charge) soit reconnu exceptionnel ?

Et bien, au sens comptable, le résultat considéré exceptionnel sera beaucoup plus rare.

Et alors ??

En pratique, prenons le cas de la vente d’un local par une société.

Ou le rachat qu’elle fait d’un compte à terme où elle avait placé sa tréso.

Cela signifie que ce produit de cession par la société, sauf si l’opération est majeure et inhabituelle (= par exemple si on parle du seul actif social, ou de l’un des principaux), entrera beaucoup + souvent en résultat courant.

Et dès lors, boum !

  • le calcul de la valeur ajoutée, donc la CVAE et le plafonnement CET, peuvent automatiquement bouger
    • sans pourtant aucune évolution de l’activité !
  • le montant de l’épargne salariale, avec une clé de calcul pour la participation ou l’intéressement fondée notamment sur l’évolution du résultat courant  : lequel peut donc exploser si l’entreprise vend des murs, une machine, un brevet, une branche d’activité, etc.. ;
    • dirigeants ou DRH doivent en être conscients, car des surprises peuvent mécaniquement apparaître à partir de l’an prochain
  • les ratios financiers, les SIG, l’EBE, la CAF… peuvent être touchés de façon notable
    • or ils fondent des méthodes de valorisation de l’entreprise, jouant sur :
      • les décisions des financeurs (banques, crowdfunding, ..),
      • les clauses de prix au sein des pactes d’associés,
      • les clauses d’earn out (complément de prix) en matière de cession de titres, qui peut être une lourde surprise pour tous : pour le cédant en présence d’une charge qui ne sera plus considéré comme exceptionnelle, ou pour le cessionnaire en présence d’un produit qui ne sera plus lu comme autre chose que courant !
      • les conditions d’activation d’une GAP, pour les mêmes raisons, lorsque le contrat prévoit un déclenchement dans le cas d’un delta trop fort entre les résultats de N et N-1,
      • etc…
Mais c'est sans fin ! C'est l'effet domino !!

C’est loin de s’arrêter là !

Pensons par exemple, puisqu’il y a un effet sur les ratios de valorisation des sociétés, sur les enjeux en matière de prépondérance :

  • par exemple celle de l’activité d’une filiale non opérationnelle, au sein d’un groupe, et donc d’éligibilité maintenue pour une holding transmise sous régime Dutreil (éligibilité qui doit tenir tout au long des engagements, rappelons-le, depuis la LFR 2022) :
    • si la ou les filiales non opérationnelles se mettent à peser plus en valeur, tout le château de cartes s’effondre, alors même qu’on aura scrupuleusement respecté les conditions !
  • idem en matière de proratas de valorisation de détentions indirecte pour l’IFI !
  • ou même en matière d’éligibilité au remploi 150-0 B ter..
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N’oublions pas les implications au sein de sociétés dont le capital est démembré, par exemple suite à une donation ou à la succession d’un associé.

Société où il sera logique que l’associé nu-propriétaire perçoive le résultat exceptionnel, sous le quasi-usufruit de l’usufruitier le cas échéant (voir à ce sujet la décision si importante de la Cour de cassation en date du 19.9.2024).

Mais si tout (ou presque) est désormais comptabilisé en résultat courant ?

Alors tout ira à l’usufruitier, non pas en quasi-usufruit, mais en pleine propriété !

Dès lors, plus de déduction de la dette de restitution lors de son décès ! = catastrophe fiscale.

Mais aussi, fuite de capitaux, s’il a d’autres héritiers ! = catastrophe familiale…

C'est tout ?

Non.

Il existe d’autres environnements que le démembrement de propriété, dans lesquels la catégorisation des résultats sert à définir leur orientation.

On pense notamment à cette forme sociale qu’est la Société en commandite simple, doté d’un régime fiscal hybride.

Par nature, elle regroupe deux catégories d’associés, les commandités et les commanditaires, dotés de profils et d’obligations distinctes alors qu’ils sont dans la même structure.

Les commandités exercent la gouvernance en engageant leur responsabilité sur tout leur patrimoine.

Les commanditaires apportent les capitaux sans rôle de gestion, et limitent leur responsabilité à ces apports.

La fraction des résultats de la SCS distribuée aux premiers subit le régime des sociétés de personnes (donc IR si ce sont des particuliers).

La fraction distribuée aux commanditaires subit le régime de l’IS.

Quel rapport avec le nouveau PCG ?

Et bien pour les raisons qui précèdent, il peut être rudement intéressant de stipuler dans les statuts d’une SCS, qui détiendrait un patrimoine locatif, que :

  • les flux de loyers, donc les résultats courants, sont réservés aux commanditaires (donc, IS et ses avantages)
  • les produits de vente (dans l’esprit, les résultats exceptionnels), reviennent aux commandités (donc, plus-value des particuliers, moins lourdement taxée qu’en BIC)

Tout repose sur la qualification du résultat !

Donc, si elle même s’en remet seulement aux normes du PCG…

Clairement, toute la stratégie peut être mise à mal, si la définition comptable du résultat ne correspond plus à ce qu'on envisageait !

C’est pour cela que dans certaines situations, il pourra être bon de revisiter, et si besoin corriger, les règles de fonctionnement juridique.

Par exemple, définir conventionnellement dans les statuts que le produit de cession sera toujours, dans les rapports entre associés, considéré comme un résultat exceptionnel.

Et s’interroger aussi sur tous les ajustements opportuns dans les pactes d’associés et les clauses de prix,

dans les clauses de complément de prix ou de libération de GAP après cession d’entreprise, etc…

Et d’en parler de façon interprofessionnelle avec tous les Conseils impliqués.

 

Pour engager ces réflexions, nos équipes spécialisées sont en pleine conscience de ces enjeux !